Comme on sait désormais que ce n’est pas cette année qu’on pourra profiter de la magie de Noël à Disneyland Paris, oublions un temps l’actualité morose en nous replongeant, le temps d’un article, dans nos souvenirs d’enfance. Un plaid, un chocolat chaud et un Mickey à la télé : la clé du Noël parfait ?
Demandez à n’importe qui ayant grandi dans les années 80/90 quels souvenirs lui évoquent les Noëls de son enfance et vous avez un de grandes chances pour qu’à un moment ou un autre, il vous parle de Disney. Moi par exemple, du haut de mes trente ans et des (grosses) poussières, je me rappelle du rituel immuable de fin d’année qui consistait à faire les 35 km qui me séparaient d’une ville pour aller voir celui qu’on appelait « le Disney de Noël ». C’était la seule sortie cinéma de l’année et elle se poursuivait immanquablement par le seul McDo de l’année dont nous repartions avec la version plastique de Sébastien, Lumière ou Abu. Avant de rentrer, ma mère faisait un crochet à feu Mammouth pour commencer les achats du réveillon et, si nous étions bien sages, nous avions droit à la K7 audio pour que Nathalie Baye nous raconte à nouveau l’histoire du film sur le chemin de la maison.
Quand tu voulais avoir Mulan dans ton Happy Meal et que tu finissais avec son chien
(Source image : Pinterest)
Bien plus qu’aujourd’hui, la sortie d’un nouveau long métrage Disney était un évènement attendu. On savait qu’après les vacances de la Toussaint, il ne resterait plus que quelques semaines à patienter pour enfin découvrir ce film que l’on voyait déjà partout, du plateau de Disney Parade aux pages des catalogues de jouets. C’était d’ailleurs à la même époque que, si je me souviens bien, sortait la VHS de celui de l’année précédente qui finissait immanquablement en bonne place sur nos listes au Père Noël. Bref, je parle ici d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître mais qui illustre parfaitement le lien qui existe entre la période des fêtes et notre souris préférée.
En plus de ce grand rendez-vous cinématographique, il y en avait un autre que nous n’aurions manqué pour rien au monde : l’émission de Noël de Disney. Diffusée sur TF1, alors détenteur des droits des émissions Disney francophones, ce programme d’environ deux heures était généralement diffusé le jour du réveillon afin d’aider les enfants à patienter jusqu’au passage du gros barbu (et à permettre aux parents de préparer le chapon). Il s’agissait d’extraits de grands classiques Disney et de courts métrages du type « Ferdinand le taureau » ou « le petit âne de Bethléem » entrecoupés de séquences qui, selon les années, étaient présentées en studio, depuis Disney World ou, après l’ouverture du parc en 1992, directement depuis Euro Disney. J’avais dans l’idée que l’émission s’était déroulée des années durant au parc, mais en fouillant sur le web, j’ai vu que dès 1993, il y avait eu une délocalisation en Tunisie, probablement en raison du succès d’Aladdin, sorti l’année d’avant.
Sur la chaîne Youtube de F’annes, vous pouvez vous faire un petit shoot d’esthétique 90’s en regardant les génériques de émissions : https://www.youtube.com/user/annemesonfans
L’émission se clôturait en apothéose par un extrait du film alors en salle ce qui était pour moi le moment le plus excitant de tous. Imaginez, dans un monde sans teaser et sans spoiler, quel évènement cela pouvait être de voir sur son écran de télé des images d’un film qui ne sortirait qu’un an plus tard en VHS ! De la même façon, les images tournées dans le parc étaient du rêve à l’état pur pour n’importe quel enfant. Rappelons-nous qu’à cette époque, le concept de parc à thème était encore très nouveau en France. Le parc Astérix et Big Bang Schtroumpf venaient d’ouvrir mais peu d’entre nous avaient encore eu la chance d’y aller. Les parcs Disney n’étaient pour nous, petits européens, que de lointaines chimères venues d’Amérique dont on n’osait même pas croire qu’elles existaient vraiment. Alors savoir que le royaume de Mickey se trouvait désormais là, aux portes de Paris, et que si on tannait assez longtemps nos parents, on irait peut-être un jour…
Les premières années, ces émissions étaient présentées par Jean-Pierre Foucault, taulier du Disney Parade, et Anne, qui était à ma génération ce qu’Aya Nakamura est à celle d’aujourd’hui, les fautes de français en moins. Anne en profitait pour nous gratifier de chansons « live » (raclement de gorge) au cas où il restait encore de la place sur nos listes de Noël pour sa dernière K7.
En 1995, le format habituel a été abandonné au profit d’une histoire impliquant un petit garçon transporté par magie au pays du Père Noël (aka Disneyland Paris), avec la chanteuse Lio. J’ai regardé quelques extraits sur YouTube et, soyons honnêtes, on est sur du bon gros WTF. Lio a des oreilles d’elfe rouges et des robes moins longues qu’un court-métrage Pixar, tout le monde joue effroyablement mal et il y a plein de chanteurs certainement très connus à l’époque mais dont je serais incapable de vous donner le nom aujourd’hui. Mais je me souviens que ma sœur et moi avons usé l’enregistrement jusqu’à la corde et qu’on s’était même acheté le best-of de Lio suite à ça. Pour les curieux, l’intégralité du programme est disponible en plusieurs parties sur YouTube.
Il me semble qu’après ça, il y a encore eu une émission tournée au Kenya, puis aux Etats-Unis, en Virginie (certainement en raison du projet de parc Disney prévu alors dans cet état et abandonné depuis) et enfin, au Puy du Fou. Je crois que c’est à ce moment-là que j’ai lâché l’affaire et délaissé Mickey pour Filip des 2be3. Je n’ai visiblement pas été la seule puisque celle tournée chez De Villiers a, à ma connaissance, été la dernière.
Mon petit frère, né en 1995, n’a pas eu la chance de connaître tout ça. Lorsqu’il a été en âge d’aller au cinéma, le deuxième âge d’or était loin et Pixar avait déjà commencé à cannibaliser l’animation traditionnelle, bouleversant dans le même temps le calendrier des sorties au cinéma. Le lancement de Disney Channel a entraîné la fin progressive des émissions Disney sur la télévision hertzienne et ne restaient plus alors que quelques dessins animés diffusés sur M6 de manière épisodique entre 1999 et 2002. Il a fallu attendre 2009 pour revoir un véritable programme de Noël à la télévision avec « En attendant Noël » présenté par Valérie Damidot depuis Disneyland Paris et qui reprenait peu ou prou le même format que celui des émissions du début des années 90 (alternance de séquences dans le parc et de dessins animés) – malheureusement pas avec le même succès. D’autres tentatives seront faites, notamment en 2011, là encore sans vraiment retrouver la flamme des émissions des années 90.
Aujourd’hui, on ne peut pour autant pas dire que Disney soit totalement absent des programmations de Noël. En période de fêtes, bon nombre de chaînes repassent les grands classiques, certaines en profitant même pour diffuser les derniers succès pour la première fois à la télévision, à l’image de M6 avec la Reine des Neiges en 2016 (plus de 6 millions de téléspectateurs). Les suites « direct to video » remplissent les grilles de la TNT tandis que chaque magazine d’actualité y va de son reportage sur les coulisses du parc à la veille du réveillon. L’arrivée récente de Disney + risque de modifier une nouvelle fois l’équation en misant sur du contenu inédit associé à des incontournables : en ces temps de confinement, qui n’aurait pas envie de redécouvrir « le Noël de Mickey » en famille avec un plaid et un chocolat chaud ? C’est en tout cas tout ce que l’on se souhaite en cette période de confinement.
Je reste traumatisée par un évènement dans le futur alternatif (Source image : sens critique)
Bien sûr, mon regard d’adulte ne peut s’empêcher d’être lucide sur l’énorme machine promotionnelle qui se cachait derrière ces trésors de mon enfance. Je revois même encore les pubs qui entrecoupaient les programmes et cherchaient à me vendre du chocolat Disney Family, un Happy Meal Aladdin ou un abonnement au Journal de Mickey. Même les pubs Esso ou Kodak se clôturaient par la mention de leur partenariat avec EuroDisney. Oui, dans la tête des patrons de Disney France, c’était un formidable outil de marketing. Mais dans ma tête à moi, c’était de la poussière de fée sur des réveillons pas forcément aussi magiques que dans les films. Et, au final, c’est tout ce qui compte.
Et si nous lancions une pétition pour le retour du chocolat Disney Family ? (source image : Pinterest)